Inde versus France

Confinement en France, confinement en Inde… Si loin et si proches à la fois...

Yoga confiné avril 2020




Quand j'ai annoncé à des amis que j'allais devoir faire sans chauffeur et sans femme de ménage, leur première réaction a été de me dire : "Bienvenue au club !" et j'ai alors, je dois l'avouer, éprouvé, honte à moi, une légère frustration. Comme si je faisais face à une certaine incompréhension. Aurais-je été trop positive dans mes articles de blog ou lorsque je vous décris notre vie en Inde ? Laissez-moi développer cela un tout petit peu…
Peut-on réellement comparer l'Inde et la France ? Qui s'y risquerait ? Allez. Je tente...



MAID EN INDE/FEMME DE MENAGE EN FRANCE (OU BIBI)




Vous êtes-vous déjà demandé une seule fois pourquoi nous, riches expatriés d'Inde, employions une maid 8 heures par jour 5 fois par semaine quand embaucher une femme de ménage ou faire votre ménage 3 heures par semaine suffit largement à maintenir à flot votre maison ?

Est-ce pour qu'elle débarrasse nos assiettes lorsque nous avons fini de manger, qu'elle nous apporte notre plateau-télé au lit ou bien pour qu'elle nous fasse une manucure et une pédicure une fois qu'elle a fini d'épousseter nos cuillères en argent et notre service en porcelaine ?

Que nenni! Si notre maid vient 8 heures par jour, c'est parce que la poussière, ici, en Inde, à cause des routes en terre et des travaux incessants de construction autour de notre immeuble, est un véritable fléau. Elle se dépose en moins d'une heure et Mary doit donc épousseter, ré-épousseter, passer le chiffon humide sur tous les meubles, les livres, dans les placards, passer l'aspirateur, la serpillère, tout cela pendant 6 heures environ par jour. Quand il lui reste un peu de temps, elle nettoie les déjections de pigeons, charmants volatiles qui recouvrent de leurs généreux excréments nauséabonds nos balcons en moins de 3 jours et prennent même souvent un malin plaisir à orner de leurs jolies crottes rondes nos vêtements en train de sécher, nous forçant à les relaver encore et encore.

Elle doit également venir à bout d'un bataillon d'insectes tous plus agréables les uns que les autres, qui rêvent d'assaillir notre prison dorée au moindre relâchement de notre part. Les moucherons dans la cuisine, les cafards qui nous rendent visite dès que nous relâchons un peu la pression sur les pest controls (une spécialité d'ici qui consiste à faire comme une dératisation mais pour les insectes tous les 6 mois), les fourmis rouges qui nous démangent pendant des semaines, les poissons d'argent qui adorent l'humidité, se fourrent dans nos vêtements et dévorent notre garde-robe en coton, laissant croire à l'œil non averti que nous nous sommes laissés aller à la consommation de cannabis vu les trous qui parsèment nos habits, et j'en passe et des meilleurs...

Et puis, il y a ces charmants moustiques… Oubliez de fermer un centimètre de moustiquaire et c'est le carnage la nuit tombée. Les classiques ne font, certes, comme chez vous, que nous mettre hors de nous avec leur délicieuse ritournelle en "bzz" majeur. Mais lorsqu'ils enfilent leur costume tigré, ils peuvent faire des ravages, comme l'an dernier, lorsqu'un de leurs chers membres a posé ses vilaines pattes sur moi et entrepris de me sucer jusqu'au sang, mais ça, j'y reviendrai un peu plus tard...


Enfin, de temps en temps, notre chère Mary doit appeler l'électricien pour réparer une prise qui a failli l'électrocuter, appeler le plombier à cause d'un dégât des eaux dans la cuisine, appeler le peintre car le mur, après la mousson, a décidé de cloquer et de se répandre au sol, comme abattu après une énième bataille vaine… Et si vous avez suivi mon blog, même en diagonale, vous devez avoir déjà compris que pour faire venir ces experts, il faut s'armer de patience et être plus qu'insistant, "tomorrow", ici, signifiant juste "pas aujourd'hui"...

D'accord, mais les 2 heures qu'il lui reste, me direz-vous, c'est pour nous faire un coq au vin ou une brandade de morue, non ? Tout faux. Rappelez-vous que nous vivons à 13 heures de route de l'océan, donc le poisson, ici, on l'oublie. Le seul magasin de viande se trouve à 1 h 15 de route de chez nous, alors nous faisons souvent l'impasse aussi, et d'ailleurs, ce n'est pas plus mal. Non. Pendant ces 2 heures restantes, Mary passe au vinaigre blanc et à l'eau filtrée nos légumes pour enlever les pesticides et autres déjections de rats et de chauves-souris qui pourraient s'y trouver. Puis, il est vrai, elle nous fait à manger, mais ce n'est pas une experte, alors si vous voulez un plat élaboré, veuillez patienter jusqu'à l'été suivant et le retour en France ou le faire vous-même, au risque de ne pas trouver tous les ingrédients dont vous avez besoin dans les magasins.

Je ne vais pas vous mentir, j'apprécie (appréciais !) d'avoir une personne pour faire ce ménage à ma place, et bien loin de moi l'idée de minimiser la tâche qui vous incombe en tant que maîtresse de maison (maître de maison ?) en France, mais bon, force est de constater que ce n'est pas vraiment comparable...



CHAUFFEUR EN INDE/BIBI QUI CONDUIT EN FRANCE




"OK. Mais le chauffeur, c'est un luxe, non ?"
Alors là, je vous arrête tout de suite. Si je pouvais conduire dans cette ville de dingues, je le ferais. Si Alstom, comme toutes les autres entreprises qui emploient des expatriés, a écrit dans son contrat qu'on avait interdiction de prendre le volant dans ce pays, c'est qu'il doit y avoir une raison, non ? Je vous passe les bouchons, les coups de Klaxon, les obstacles variés et surprenants qui vous barrent la route, les images parlent d'elles-mêmes...

 




Bangalore a été élue ville la plus embouteillée du monde cette année, nous ne sommes pas peu fiers de cette distinction, qui est amplement méritée, preuves à l'appui…


 

J'imagine que vous comprenez désormais pourquoi il nous est difficile de conduire dans cette jungle… Alors, certes, nous avons récemment converti notre permis français en permis indien pour pouvoir nous rendre à l'hôpital légalement en cas de problème, mais nous évitons autant que possible de prendre des risques inutiles...


Pour éviter de croiser des véhicules non identifiés, par exemple...




OK. Mais hormis ces 2 différences, chauffeur et femme de ménage, qu'y a-t-il de si différent entre une vie d'expatrié en Inde et une vie de Français lambda ?




EAU EN BONBONNE OU EAU DANS DES JARRES EN INDE/EAU POTABLE AU ROBINET EN FRANCE



Vous êtes-vous déjà dit une seule fois (soyez honnêtes !) que vous aviez énormément de chance d'avoir de l'eau potable qui coulait de votre robinet chaque fois que vous en aviez besoin, pour boire, pour vous laver, pour vos toilettes et même pour arroser les jolies plantes de votre jardin ou de votre balcon ?

Que ce soit pendant les manifestations des Gilets jaunes ou pendant la crise sanitaire liée au Coronavirus, l'eau coule toujours à flot dans les pays riches, sans même que quiconque apprécie cet or pur à sa juste valeur. Savez-vous que 30 % des gens dans le monde n'ont pas accès à l'eau potable et 60 % ne disposent pas de services d'assainissement gérés en toute sécurité ?

Eh bien, en Inde, même les riches expats se doivent d'acheter des bonbonnes d'eau pour vivre. Je vous laisse imaginer ce qui se passerait si l'approvisionnement devenait compliqué...

Un appareil nous délivre, certes, de l'eau filtrée, mais à un mètre au-dessus de notre évier, donc pour laver nos légumes, c'est la douche assurée à chaque fois. Tout un poème... Remarquez, il fait chaud, ça fait du bien ! Et d'ailleurs, il vient de tomber en panne aujourd'hui et inutile d'appeler un réparateur, il ne viendra pas. Nous laverons désormais nos légumes dans mon bureau...



L'appareil qui nous délivre l'eau filtrée habituellement, en haut à droite.




B
ien loin l'idée de nous plaindre alors que nous voyons régulièrement des femmes parcourir plusieurs centaines de mètres pour aller chercher de l'eau qu'elles portent habilement sur leur tête...



COUPURES D'ELECTRICITE EN INDE/ELECTRICITE EN FRANCE




Les rares personnes qui sont venues nous voir en Inde ont très vite fait l'expérience de la coupure d'électricité. Ah oui, l'électricité, encore une chose qui semble acquise pour la majorité des Européens... Eh bien nous, nous avons appris à nous accommoder d'une panne plus ou moins longue. Pas vraiment ce qui nous a le plus dérangés, ceci dit. Après avoir vidé notre stock de bougies (affreux cadeaux d'école de nos chères filles !!!), nous avons appris à dîner à la lumière de notre portable en le glissant sous un verre pour obtenir une lumière diffuse. 
En pleine fête, la musique se coupe ? Nous prenons le relais en chantant. Le téléchargement de mon film (pour mon travail) s'arrête ? J'en profite pour aller déjeuner ou me laver et je relance le téléchargement après. Une panne de plus de 12 heures ? Le réfrigérateur est en danger ? On met tout dans des glacières et on les apporte chez une voisine dans un autre immeuble après nous être assurés qu'elle a bien de l'électricité, elle ! (Eh oui, ce serait dommage, sinon…)
Bref, à défaut d'avoir de la lumière en permanence, nous sommes devenus créatifs et patients.

Mais il y a bien plus embêtant que ces coupures de courant à répétition...



LES SINGES DANS LES ZOOS EN FRANCE/LES SINGES EN VILLE EN INDE



Eh oui, en Inde, nous devons lutter contre des bêtes légèrement plus envahissantes et plus agressives que les insectes dont j'ai déjà parlé plus haut…

Les singes, dont on a repoussé l'habitat avec l'extension des villes, font régulièrement leur apparition en bandes sur nos balcons quand ce n'est pas à l'intérieur de nos appartements quand ils parviennent à ouvrir nos portes coulissantes et nos moustiquaires. Quelqu'un a dû mettre la notice sur le Net car visiblement, ils savent désormais tous le faire...

Une de mes copines s'est ainsi retrouvée face à un de ces monstres (ah oui, oubliez les gentils petits singes des zoos, les nôtres ont faim !), dans sa cuisine, en train d'ouvrir son réfrigérateur pour l'en vider de son contenu. J'ai moi-même pu expérimenter l'agression d'un singe, qui a dérobé la bouteille de soda orange d'une petite fille qui se trouvait dans les bras de son papa. Il lui a littéralement sauté dessus, lui a arraché la bouteille des mains, a bondi de nouveau jusqu'en haut du temple, puis s'est empressé d'ouvrir le soda d'un geste habile mille fois effectué, puis de le siroter. Car oui, nos singes indiens sont malins et complètement accros au sucre. Je n'ai pas les résultats de leur taux de glycémie, mais je peux vous parier qu'ils sont tous diabétiques !


 



LES GENTILS TOUTOUS DOMESTIQUES EN FRANCE/LES CHIENS ERRANTS EN INDE





OK. Celui-ci a l'air inoffensif...


Les chiens… Parlons des chiens... Vous avez tous entendu parler d'une attaque de chien en France, car oui, cela arrive aussi en Occident. Mais vous êtes-vous déjà retrouvé face à une meute de chiens qui vous hurle dessus ? Avez-vous déjà été réveillé par des dizaines et des dizaines de chiens affamés (surtout en ce moment vu qu'ils n'ont plus rien à manger…) ? Vous êtes-vous déjà fait courser à vélo par un chien agressif qui semble avoir une terrible envie de vous dévorer le mollet ? Vous êtes-vous enfin fait vacciner contre la rage au cas où ??? Non. Eh bien, nous, si, et il y a des raisons, croyez-moi.



LES VACHES DANS LES PRES EN FRANCE/LES VACHES DANS LA RUE EN INDE




Mais, me direz-vous, nous aussi, on a des vaches… C'est vrai. En France, on trouve des vaches dodues dans les prés, qui broutent de l'herbe et font tinter leurs clarines dans les montagnes. Ici, nous avons des vaches squelettiques qui déambulent au milieu de la route et qui broutent, imperturbables... des paquets de chips vides et des ordures. La comparaison s'arrête donc là, vous en conviendrez aisément.


France ou Inde ?
France ou Inde ?
France ou Inde ?

France ou Inde ?



Vous avez répondu très rapidement et sans hésitation au quiz ? C'est donc que vous voyez parfaitement ce que je veux dire quand je vous assure que nous n'avons pas les mêmes vaches...




Mais les nôtres sont tellement plus drôles !!!



LES AUTRES ANIMAUX EN FRANCE/ LES ANIMAUX EN INDE




Je vous passe les mouches agglutinées sur les pièces de viande qui pendent au soleil devant les échoppes ou les poulets, encore vivants, eux, qui s'agglutinent dans des cages au bord de la route. Je vous passe également tous les autres animaux qu'on peut trouver à tout moment au milieu de la route, ceci tient plus de l'attraction que de la gêne. Sauf les fois où vous vous trouvez bloqué par un troupeau de moutons en pleine ville, mais là, vous allez me dire que ça vous est déjà arrivé à la montagne ou à la campagne, donc je n'insiste pas...
Mais je ne résiste pas à vous montrer quelques images, tout de même, toutes made in India !







Des images comme celles-ci, j'en ai des dizaines, j'ai dû faire un tri...


Poule en France
Poules en Inde


Cheval à Paris

Chevaux à Rishikesh





LES POLITIQUES VOUS FONT AVALER DES COULEUVRES EN FRANCE/EN INDE, ON ESSAIE DE NE PAS SE FAIRE AVALER PAR LES COBRAS



Les cobras... Ah oui, là, je comprends pourquoi certains d'entre vous ne sont jamais venus nous voir... Enfin, j'espère que c'est à cause de ça...

Force est de constater que vous n'avez jamais pu vous trouver nez à nez avec un cobra en France. A moins qu'un de vos voisins parisiens ait eu la mauvaise idée d'en rapporter un d'un de ses voyages dans un pays exotique. Nous, des cobras, nous en avons eu en bas de chez nous. Régulièrement, nos voisins nous envoient des photos des plus beaux spécimens sur les groupes What'sapp histoire de nous faire flipper en continu. Nos copains qui habitent dans des compounds avec maisons en ont quasiment tous croisé au moins un une fois dans leur jardin. Une de mes amies a perdu 3 chiens attaqués par cette vile créature... Alors oui, on ne va pas se mentir, il y a des risques même en tant qu'expatrié, à vivre en Inde.


Cet animal est absolument ravissant...




LE GROUPE SCORPION EN FRANCE/LES SCORPIONS EN INDE





Des scorpions, personnellement, je n'en avais jamais vu avant de venir en Inde. Et puis, une amie en a trouvé un sous sa table... Ensuite, on en a retrouvé un (mort, heureusement !) dans une piscine, alors je me suis dit qu'il fallait rester sur ses gardes, on ne sait jamais...




Bien moins sympa que le groupe de musique, donc...





LES RATS DES VILLES ET LES RATS DES CHAMPS





Ah ! Les rats… Alors oui, vous en avez en France et nous aussi : des gros, des ventrus, des repoussants... Egalité. Un point partout.


Celui-ci est un spécimen d'Inde





Mais à part les animaux, quelles sont les autres différences entre France et Inde ?

Ceux qui ont passé ne serait-ce qu'une journée en Inde se souviennent de 3 choses marquantes : le bruit, l'odeur et la pollution.




LE BRUIT ET LE MONDE PARTOUT, TOUT LE TEMPS EN INDE




Je ne vous apprends rien, les Indiens aiment le bruit et ils ont pour habitude de se saluer, de signaler leur présence ou de montrer leur mécontentement… en klaxonnant. Ce n'est pas ce qui me gêne le plus en Inde, je trouve ça même assez charmant, mais parfois, tout de même, je me dis que mon mal de tête pourrait bien venir de là, de ce bruit incessant dès que je monte dans une voiture ou que je marche (!!!) dans Bangalore.



Commercial Street un samedi soir à Bangalore...

A propos de marcher, voilà bien une autre différence entre les Français et les Indiens. Difficile de traverser une route ici sans une certaine expérience de l'Inde. Difficile de jouer des coudes dans les quartiers commerçants, d'éviter les trous dans les fossés (peut-on réellement parler de trottoir ?) ou de ne pas se prendre les pieds dans divers obstacles.

Comme les balades sur la promenade au bord de mer de La Rochelle me manquent dans ces moments-là, tout autant que mes traversées dans Paris !



Ah ! La Rochelle, son port, son calme...

Quoique... Pour être parfaitement honnête, ça arrive aussi, en France d'avoir des rues bondées...

Le jour de la victoire de la Coupe du Monde, à Paris...

Le jour des soldes, rue Sainte-Catherine, à Bordeaux...




La pollution en France/LA POLLUTION EN INDE




La différence que j'aurais dû évoquer en premier, et qui fait fi des classes sociales ou autres castes, c'est la pollution, bien sûr. Est-ce nécessaire de vous rappeler les chiffres ? 80 ppm à Paris quand on parle de pic de pollution, 160 ppm en moyenne à Bangalore, jamais vu en dessous de 65, même maintenant, alors que la ville est cristallisée et qu'il n'y a plus personne dehors… Cependant, nous sommes plutôt bien lotis comparés à New Delhi qui dépasse parfois les 800 ppm au point que les machines se détraquent et ne parviennent même plus à mesurer le taux. La pollution est bien le problème numéro 1 de l'Inde avec le manque d'eau.



LE PARFUM DES FLEURS EN FRANCE/L'ODEUR EN INDE


Enfin, l'odeur… Ce curieux mélange de friture, de pollution, de jasmin, de brûlot, de chicken biryani et autres chicken masalas chatouille nos narines chaque jour. Et encore, ça, c'est dans le meilleur des cas.

Notre immeuble étant situé juste à côté d'une rivière/bouche d'égout/décharge à ciel ouvert, qui s'écoule jusque dans le (joli !!!) lac qui borde notre immeuble de l'autre côté, l'odeur, lorsque nous ouvrons nos fenêtres côté jardin, est souvent pestilentielle, nous obligeant à les refermer aussi sec.


Il est si beau, le Nagawara Lake, pourtant, de nuit...


Quand nous déplions nos valises en France, notre premier réflexe est de tout laver car l'odeur a hélas voyagé avec nous… On l'oublierait presque, cette odeur, mais chaque fois que nous revenons ici, dès l'aéroport, elle nous saute au nez !




LES INONDATIONS EN FRANCE/ LA MOUSSON EN INDE





J'allais oublier un détail… La mousson !
Fred pourrait vous en parler mieux que moi puisqu'il a dû l'affronter à vélo assez souvent. Malgré l''eau saumâtre qui lui remonte parfois jusqu'au niveau des cuisses, il n'a d'autre choix que de continuer son périple, imperturbable, trempé jusqu'aux os, jusque chez nous, home sweet home, petit paradis artificiel, prison dorée comme certains aiment à l'appeler, bulle, vous l'aurez compris, indispensable pour permettre de supporter tout ce qui précède. Mais comment nous plaindre quand des milliers de gens sont délogés, attrapent des maladies ou meurent chaque année à cause de la mousson en Inde ?


LES CRS FRANCAIS/LES COUPS DE BÂTON EN INDE




La violence en Inde a toujours existé. Des coups de règle à l'école, c'était quelque chose de courant en France pour la génération de nos parents. Ici, les coups de bâton sont hélas toujours la règle dans les écoles gouvernementales (sans jeu de mots, hélas !).
Mais la nouveauté, qui n'en est pas une, à vrai dire, mais que, jusqu'ici, j'avais voulu ignorer, c'est la violence policière. Depuis le confinement, ils s'en donnent à cœur joie, jouant du bâton contre ceux qui essaient de regagner leurs villages à pied vu qu'il n'y a plus aucun moyen de transports qui fonctionne ou contre tous ceux qui essaient de contourner la loi du confinement.

Question violence, je pourrais aussi vous parler des viols, des femmes brûlées vives après avoir été violées, etc. mais à vrai dire, à Bangalore, c'est quelque chose qui reste peu commun. Bangalore est une ville moderne qui offre beaucoup de travail à ses habitants, bien moins violente que ses jumelles du Nord, donc les nouvelles qui parviennent jusqu'à vos oreilles en France ne nous concernent que très peu.




LA PROPRETE FRANCAISE/LA CRASSE INDIENNE




Chaque fois que je rentre l'été, je trouve la France si belle, si propre… Je me souviens que ma première réaction, en sortant du métro à Porte de Vincennes, a été de penser : "Waouh ! Je pourrais m'allonger sur le sol tellement ce parvis est propre !" Idem lorsque je sillonne la France. Je me surprends à m'émerveiller devant ces jolis rondins de bois et ces jolies haies si bien alignés qui séparent la route de la piste cyclable, de ce tapis d'asphalte si parfait qui se déroule devant moi, de ces églises si bien rénovées, de ces maisons, même dans les lotissements, si bien entretenues...

En Inde, c'est à peu près... tout l'opposé. Pas de plan d'urbanisme, des immeubles qui poussent comme des champignons dans les villes, rasant au passage des bidonvilles ou des échoppes, des auto-ponts absolument partout pour essayer (en vain) de délester de ses milliers de véhicules un carrefour, des échoppes en veux-tu en voilà sur des kilomètres et des kilomètres, mais surtout des ordures partout, tout le temps, qu'on finit par oublier, de la boue dès qu'il pleut et des obstacles inattendus à chaque coin de rue. La première chose qu'on apprend en arrivant en Inde, c'est à regarder ses pieds (oubliez les tongs, la Birkenstock avec un talon doit être privilégiée pour éviter de finir avec les pieds boueux et crasseux, voire transpercés par un fil de fer rouillé...), mais à regarder également devant, derrière et sur les côtés au cas où un Scooter, un rickshaw, un camion, un bus, un tracteur, une vache, une chèvre ou un léopard ne vous bouscule. Nul n'est à l'abri de glisser sur une peau de banane, un tas de canne à sucre, de noix de coco ou encore une bouse de vache... La vigilance doit être de rigueur et je vous garantis que c'est épuisant. Comme Kali et ses 8 bras, on se prend parfois à rêver d'avoir 8 yeux pour pouvoir avoir un œil partout et éviter l'accident.





LES VOITURES ELECTRIQUES EN FRANCE/LES RICKSHAWS EN INDE





L'Inde ne serait pas l'Inde sans ses fameux rickshaws...







Ceux de Bangalore sont jaunes et verts (sauf le rickshaw électrique acheté par ma copine Nathalie, le 1er que j'aie vu à Bangalore, d'ailleurs) et vous transportent pour une modique somme, si vous n'avez pas peur d'être secoués et d'humer les odeurs de pots d'échappement, de subir la poussière et la pollution, d'un point A à un point B dans la ville en un temps qui reste plus qu'aléatoire selon l'heure et la circulation du jour. Les jours de festival, la ville devient déserte, les jours de mousson, la ville se fige. Les jours de coronavirus, les rickshaws, les tracteurs, les motos, les voitures, les camions, les bus sont à l'arrêt... Et ça donne ça. On rêverait presque que l'épidémie dure encore un peu...









LES TOILETTES SECHES EN FRANCE ?/LES TOILETTES... INDIENNES EN INDE




J'ai hésité à aborder un sujet aussi trivial et anecdotique que les latrines, mais force est de constater que tout un chacun les utilise plusieurs fois par jour et que leur état est donc loin d'être un détail.

Quand, en France, nous en sommes à nous demander si nous allons opter pour une chasse d'eau avec un bouton en métal ou en plastique pour tirer la chasse ou bien encore des toilettes sèches au fond du jardin, l'Inde reste un pays qui manque cruellement de toilettes, ce qui explique que vous voyiez encore régulièrement des gens uriner, voire plus au bord de la route. Les toilettes existantes sont pour le moins repoussantes.
Au cours de nos différents périples, nous n'avons pas pu éviter de croiser leurs chemins et les réactions des enfants ou de nos invités sont invariablement les mêmes : "Ah non ! Impossible ! Je préfère encore me faire pipi dessus." Sauf qu'il n'y a pas le choix. Dans le meilleur des cas, vous tombez sur des toilettes à la turque (sales !), dans le pire des cas, sur des toilettes classiques (très sales) et vous entraînez vos triceps et vos abdos pour éviter de toucher à quoi que ce soit.

Dans les hôpitaux, les centres administratifs ou les studios de yoga, vous pouvez éventuellement tomber sur des toilettes correctes (aux standards européens d'après-guerre) et agrémentées d'un délicieux parfum de camphre !!! Cette odeur, jamais nous ne l'oublierons. Ces galets de camphre qu'on trouve dans tous les sanitaires indiens sont censés repousser les cafards. Seule exception, puisque je me dois d'être parfaitement objective, 2 endroits où les toilettes sont parfaitement clean : à l'aéroport et dans les malls, mais comme vous l'aurez compris, je n'y passe pas ma vie !




L'HÔPITAL FRANCAIS/L'HÔPITAL INDIEN





Sujet tendu, en ce moment, je le conçois. En Inde, si vous payez le prix fort, vous pouvez obtenir un standard quasi européen pour vous faire soigner. J'ai bien dit quasi...




D'abord payez !




A quelques différences près, tout de même. Tout d'abord, rien ne se passe sans que vous ne payiez. Vous êtes à l'agonie ? En sang ? Ecroulé au sol en pleine crise d'épilepsie ? On vous tend (en souriant, et très calmement, car les Indiens sont toujours souriants et extrêmemement calmes lorsqu'il s'agit de recevoir de l'argent) l'appareil à carte bleu et vous avez intérêt à avoir gardé un doigt en bon état et votre esprit pas trop embué pour taper les 4 chiffres de votre code, sinon, on vous laisse littéralement crever à l'accueil… Pas de dérogation possible. Pas d'argent, pas de traitement !




Oubliez les calmants !




L'autre souci de l'hôpital indien, c'est leur côté pingre au niveau des calmants.

Je garde 3 souvenirs assez intenses de mes passages à l'hôpital. Excusez-moi par avance, ça va être un peu long...


Le premier se déroule en pleine nuit, lorsque d'un coup, je me réveille prise d'une atroce douleur au ventre. Ceux qui connaissent quelqu'un qui a déjà eu un calcul rénal vous le confirmeront, c'est une des pires douleurs au monde, bien devant celle de mes 3 accouchements cumulés. Fred, une année plus tard, en a fait l'expérience en Chine et a pu confirmer mon constat. La bonne nouvelle, on en meurt rarement...

Bref, Fred m'emmène à l'hôpital en pleine nuit, je débarque là-bas, mon très cher époux tape le code magique sur la machine à carte bleue pour que j'obtienne le droit de voir un médecin, et on m'accorde alors le droit de m'allonger sur un lit, ce qui, en aucun cas, n'atténue la douleur...

La suite ? Eh bien, je souffre comme jamais pendant 3 heures malgré mes appels à l'aide, mes cris de Française offusquée, mes demandes d'anesthésie générale... Oui. J'étais vraiment à bout ! Au bout de 3 heures, ils daignent enfin m'injecter un calmant, puis deux, puis (après mes cris d'appel au secours qui commencent à faire peur à mes voisins qui vomissent à côté !!!), un 3e produit anesthésiant qui vient enfin à bout de ma souffrance…



Le 2e exemple, c'est un doublon dengue pour moi et fracture du bras avec déplacement pour Amaïa, aux îles Andaman, tout ça au cours de la même semaine de vacances (avril 2019). Eh oui, on ne fait pas les choses à moitié dans la famille !!!

Les îles Andaman, au cas où certains l'ignoreraient, sont des îles indiennes au large de Chennai, qui ont tout de la carte postale, mais des conditions sanitaires (je l'ai appris à mes dépens un peu plus tard) plutôt rudimentaires...

Nous arrivons à Port Blair un samedi soir. Nous sommes obligées d'y dormir une nuit avant de pouvoir prendre le ferry pour nous rendre à Havelock (l'île où se trouve notre hôtel). A Port Blair, nous avons la malchance d'avoir une petite piscine. Les filles l'aperçoivent et se jettent dedans, ravies. 



Ou comment une piscine se transforme en lieu de tous les dangers...


Ca, c'est juste avant que je m'aperçoive qu'il y a des nuées de moustiques tigres au bord de la piscine. J'en tue plusieurs sur mes cuisses et rameute la foule. Sauve qui peut, on rentre dans la chambre et on se barricade ! Mais le mal, hélas, est déjà fait...


La suite...

A peine arrivés à notre 2e hôtel, à Havelock, donc, après une traversée en ferry d'une heure trente et une bonne demi-heure de route chaotique, je passe à la réception pour faire le check-in. Pendant ce temps, les filles découvrent une balançoire sous un arbre…

Soudain, j'entends un énorme cri. Je comprends tout de suite que ce n'est pas juste un énième cri, mais LE CRI, celui qui signifie : "Je me suis fait très, très mal.". Je vais voir, je découvre le bras d'Amaïa et son visage crispé, ses cris et sa pâleur, et je comprends immédiatement qu'il s'agit d'une urgence. Amaïa est tombée le bras le premier sur une racine d'arbre à l'âme combative. Et hélas, c'est la racine qui a remporté le combat.



L'objet du crime, 5 mn avant le drame

Une course contre la montre s'engage alors : le directeur de l'hôtel me trouve un chauffeur et une voiture et nous partons au dispensaire local, à 30 mn de là. Chaque virage et chaque ornière sont une épreuve pour Amaïa et son bras douloureux. Je chante dans la voiture pour détourner son attention. Mon Dieu, qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour apaiser une enfant qui souffre et lui faire croire que tout va bien se passer...

Quand j'arrive au dispensaire, je n'en mène pas large. L'endroit ressemble à un lieu à l'abandon, sale et un peu effrayant. C'est un dimanche, il n'y a personne, juste 2, 3 dames en blanc et un monsieur qui se prétend radiologue (70 ans à vue de nez…). Il me conduit à la radio. Bon. Là, je me dis que ça ne va pas le faire. C'est comme si on m'avait emmené chez un antiquaire peu regardant sur le ménage et collectionneur de vieux appareils médicaux… Bref, Amaïa fait sa radio et l'imposteur m'annonce que ce n'est pas cassé, mais qu'il faut faire un plâtre ! (Cherchez l'erreur !)

2 femmes en blanc (des infirmières ?) trempent alors des bandes de plâtre dans une cuvette en métal et lui font ce qui sera son premier plâtre d'une longue série...



 



Le gars de l'hôtel me dit qu'il vaudrait quand même mieux que je retourne à Port Blair pour faire une radio à l'hôpital. J'acquiesce, ça me semble en effet indispensable...


Retour à l'hôtel en 4e vitesse, 30 mn de route... Aïnhoa nous a préparé une valise d'appoint car tout le monde a déjà compris que nous ne reviendrions pas tout de suite. Je laisse donc Aïnhoa et Aëlya à mon amie Emma et je repars au ferry avec mon Amaïa. Nous attendons le ferry dans un bar dans une chaleur étouffante pendant une heure trente, mangeons nos 2 bananes fournies par l'hôtel, prenons le ferry, (1 h 30), débarquons à Port Blair que nous avions quitté le matin (!!!), une voiture et un chauffeur nous y attendent, car le gentil monsieur de l'hôtel nous a bichonnées, les Indiens, même aux îles Andaman, sont très, très gentils avec les touristes.



Direction l'hôpital et là, je déchante une 2e fois. Cet hôpital, j'imagine qu'il ressemble à nos hôpitaux dans les années 1960, et encore… Bref, je ne fais pas la fine bouche, si on peut avoir la chance de voir un vrai médecin…

Ah ben non, nous sommes dimanche, il n'y en a pas. On va voir un infirmier, il observe la radio et nous dit que c'est peut-être cassé, qu'il faudrait aller voir le seul interne qui est dans l'hôpital ce jour-là. Nous parcourons de longs couloirs, toujours avec un gentil monsieur qui nous accompagne, nous allons à droite, on nous dit de repartir à gauche, nous allons à gauche, on nous dit qu'il faut aller en haut, nous montons l'escalier, on nous dit qu'il faut redescendre…

Et enfin, nous arrivons à une salle qui recueille toutes les misères des îles… De longues rangées de lits s'alignent dans cette salle à la chaleur étouffante, où certaines personnes, vu les râles qu'elles poussent, sont en train de passer l'arme à gauche. J'aperçois des gens avec d'énormes plâtres blancs pas très différents de celui que porte Amaïa...

J'essaie de détourner l'attention d'Amaïa de ceux qui semblent les plus touchés et nous patientons sur un lit tout près de la sortie, heureusement, le seul endroit où il y a encore un tout petit peu d'air... Quelques enfants viennent nous demander ce que nous faisons là. Vous l'aurez compris, nous sommes les seuls Blancs de l'hôpital et nous suscitons quelque peu la curiosité de cette foule du dimanche.




Le meilleur hôpital des îles Andaman...



Au bout d'une bonne heure d'attente, l'interne apparaît enfin. Il me confirme que c'est cassé, fait venir Amaïa dans un petit local dégoûtant et la prend en charge...



Là, il lui enlève son premier plâtre et, tandis que je réponds à SOS international (le service de santé des expats qui vous appelle pour vous dire quoi faire, mais là, en fait, ils ne savaient pas quoi faire...), un balayeur et un monsieur qui passaient par là se retrouve embauchés pour maintenir Amaïa sur son lit fermement pendant que notre interne lui tourne le bras dans tous les sens pour réduire sa fracture. Je vous passe les détails et les cris. C'est juste intenable. Puis, on lui met des bandes de plâtre presque jusqu'à l'épaule, rien que ça (pour une fracture du radius, au final...)



Pour faire bref, le soir, nous dormons à Port Blair car nous devons revoir un vrai médecin le lendemain matin.




Le gars qui nous accompagne depuis le début demande à Amaïa ce qu'elle voudrait et lui promet de le lui trouver. Celle-ci lui demande du chocolat et reçoit une jolie boîte de Cadbury fondus et sans goût, mais comme elle est très bien élevée, elle fait son plus beau sourire au monsieur qui lui a déniché ça en moins d'une heure et en prend un pour lui faire plaisir. Le soir, nous avalons nos pâtes épicées en 5 minutes et Amaïa pousse la chansonnette dans la salle de bains. Un des meilleurs souvenirs de notre séjour aux îles Andaman. Sa voix porte toute l'émotion de cette journée intense. Un délice !



Le lendemain, changement d'ambiance, l'hôpital est bondé, il fait 40 degrés, un gros pourcentage d'humidité, pas de clim, un seul ventilateur pour tout un couloir d'attente pour voir le seul médecin orthopédiste de l'hôpital. Nous faisons calmement la queue.


Hôpital de Port Blair


Je sens mon Amaïa qui fond littéralement sur place. Moi-même, je commence à me sentir mal. Au bout d'une bonne heure d'attente, je vois un petit groupe qui semble parler de nous en hindi. Je comprends vite qu'ils veulent nous laisser passer pour que nous gardions une bonne opinion de l'Inde (car les Indiens sont toujours très gentils avec nous, et encore plus lorsqu'on a des enfants).


L'attente dans le couloir de l'hôpital de Port Blair...

En règle générale, j'aurais refusé, mais là, vu la chaleur suffocante et le voile que je dois porter pour rester décente et couvrir mes épaules, je dis oui et ni une ni deux, nous sautons dans le bureau du médecin, climatisé, lui.

Nous restons moins de 2 mn dans son cabinet. Il observe rapidement la radio et le plâtre qui ne ressemble à rien. Je lui explique que dans une semaine, nous rentrons à Bangalore et il me dit : "Vous en ferez refaire un convenable à Bangalore, ça tiendra d'ici là". J'acquiesce et nous nous sauvons. Avec un peu de chance, nous attraperons le prochain ferry.

Nous arrivons au port, nous prenons le premier ferry qui passe, pas de chance, celui-là met 3 heures pour arriver à Havelock et c'est ambiance musique à fond car de jeunes mariés et leurs invités, passablement éméchés, ont décidé de prendre de l'avance sur la fête (les Indiens sont tous sourds ou alors ils adorent la musique très, très forte...)







Le lendemain, nous passons une très belle journée (la seule tous ensemble !!!). Au programme : balade en kayak dans la mangrove le matin, plage l'après-midi et même une session de yoga dans la forêt, Emma étant censée me prendre en photo pour ma future école... Sauf que pendant mon yoga, je sens la fièvre monter... Non. Ce n'est pas... Si. C'est peut-être... Hélas, oui, c'est sûr, c'est...


Prêtes pour le kayak

Matinée kayak dans la mangrove d'Havelock


Ashtanga dans la forêt la seule chouette journée aux îles Andaman


La suite de l'histoire, certains la connaissent déjà. Le même soir, je tombe malade et suis incapable d'aller dîner. Je laisse les filles à Emma et file me coucher. Le moustique tigre d'Havelock ne m'avait donc pas loupée, j'ai attrapé la dengue.

4 jours à 40 degrés, des courbatures à avoir envie de se couper les bras, du chaud, du froid, un mal de tête affreux et enfin, la délivrance, la chute de la fièvre, mais avec elle, celle des plaquettes et 4 jours d'hospitalisation à mon retour à Bangalore. Tout un poème, la dengue, vraiment…



Hôpital de Bangalore.
C'était vraiment sympa, les îles Andaman...


Pour la petite histoire...

Les filles se sont régalées, plâtre ou pas plâtre...
Emma, mon amie médecin (heureusement !) a acheté de la gaze et a refait le plâtre provisoire tout mou d'Amaïa après chaque baignade...



Pas malheureuse avec son plâtre customisé, Amaïa !
Plâtre recouvert de sac poubelle pour éviter (en vain) de le mouiller...


Et le lundi, à notre retour à Bangalore, alors que je suis hospitalisée,
Amaïa peut enfin bénéficier d'un plâtre digne de ce nom.



Et moi, vous l'aurez compris, je suis incapable de vous décrire les îles Andaman, qui ont pourtant l'air magnifiques... Rajoutez à ça que Fred, pendant notre séjour dépaysant, se trouve en Chine et que la couverture Internet de l'île est quasi inexistante et vous obtenez nos meilleures vacances en 5 ans d'Inde...

Vous me direz, quelle idée d'aller aux ïles Andaman ? Il suffisait de rester à Bangalore ! Eh bien, vous avez tout à fait... raison !




Les médecins indiens vous prennent pour des rigolos puis posent des diagnostics qui vous empêchent de dormir pendant une semaine !



Mon 3e passage à l'hôpital en Inde est plutôt récent. Le coronavirus fait déjà des ravages un peu partout dans le monde quand je décide de me rendre à l'hôpital car je ne dors plus depuis 3 jours à cause d'une vilaine toux. Je me sens également très fatiguée.

Je vais donc consulter un pneumologue, qui m'interroge. Je lui dis que je suis un peu inquiète, il écrit sur son rapport que je suis stressée ++. Il me demande si j'ai des fuites urinaires, je tousse depuis une semaine, la nuit parfois sans interruption, je fais un rictus dépité, il note sur son rapport que je suis incontinente ++... Mais tout ça, je ne m'en apercevrai que plus tard, au moment d'aller réclamer mes médicaments...

Ensuite, il m'envoie faire une radio en me rassurant : "Vous savez, je n'arrête pas de voir des gens comme vous (comprenez, des Blancs) qui sont très stressés à cause du coronavirus..."

Je pars à la radio, je vous passe l'attente, je reviens le voir, et là, après avoir regardé le cliché, il m'annonce, le sourire moqueur sur son visage ayant brutalement disparu, que j'ai de fortes chances d'avoir... la tuberculose !

Alors, d'un coup, son rapport n'est plus totalement faux, je suis stressée +++ ! Quand je le réinterroge pour être sûre d'avoir bien compris, il me dit que ça peut être un virus, une bronchite ou... la tuberculose, mais que lui, au vu de la radio, penche plutôt pour cette dernière possibilité. Il m'enterre une 2e fois. Et me laisse repartir avec... un antibio !

Le soir, nous appelons SOS international, puis ma copine Vanessa qui est médecin, et les deux sont catégoriques, il faut faire davantage de tests. Alors c'est parti pour, je ne vous mens pas, 4 heures par jour à l'hôpital pendant 4 jours. Le 5e jour, vu que les pneumologues ne sont toujours pas sûrs après les tests de crachat, le scanner, la prise de sang, le test de Mantoux et j'en passe et des meilleurs, j'ai droit à une bronchoscopie.

Et là, re-douleur, quand on m'enfonce le tube dans la gorge sans anesthésie (ou si légère !). La première fois, je lutte et défonce littéralement les 5 personnes fort agréables qui se trouvent autour de moi et qui essaient de me maintenir fermement sur le lit : coups de pied, coups de poing, je me débats comme une lionne et ils finissent par retirer le tuyau, vaincus. Ils m'expliquent calmement (oui, oui, les Indiens sont toujours très, très calmes, mais pas moi à cet instant !) que soit je me laisse faire et je sors dans 30 mn, ce qui est complètement faux puisque je sortirai 4 heures plus tard (les Indiens ne sont pas menteurs mais ne disent pas toute la vérité…), soit j'opte pour l'anesthésie générale et je reste à l'hôpital une nuit (en période d'épidémie, mieux vaut y passer le moins de temps possible, vous en conviendrez...).

Donc, je me calme, à moins que le médecin m'ait enfin mis un peu plus de gaz hilarant et ils réussissent enfin à m'aspirer les bronches. Pendant 10 jours, j'en garderai des séquelles, douleur dans la gorge à chaque fois que je déglutis et que j'avale quelque chose. Résultat des courses, 4 jours plus tard, le diagnostic tombe : j'ai "juste" une pneumonie ! Je suis soulagée. Je tousserai encore pendant un bon mois, mais au moins, ce n'est pas la tuberculose. Merci, monsieur le pneumologue !!!

L'Inde est définitivement un pays qui vous fait vivre de grandes émotions. Vous ne pouvez pas imaginer comme j'ai apprécié d'apprendre que j'avais "seulement" une pneumonie et comme j'en ai toussé de joie !





LA NOURRITURE EN FRANCE/LA NOURRITURE VEGETARIENNE INDIENNE




En 5 ans en Inde, malgré quelques crises ponctuelles qui prouvent à quel point il est difficile de se désintoxiquer du sucre et du sel, j'ai radicalement changé de comportement alimentaire. Finies les orgies de bonbons, de gâteaux, de fromage... Retour à l'essentiel : de l'eau, des légumes, des fruits et quelques féculents et oeufs...

Crise ponctuelle, donc…
Mes bonbons préférés envoyés par ma sœur,
impossible de résister...

Ces derniers jours, vous avez été nombreux à partager avec nous des photos de plats gargantuesques et tous plus alléchants les uns que les autres. Il devient aujourd'hui difficile de nous approvisionner en nourriture. Les queues pour obtenir quelques légumes vitaux sont longues, très longues, même... Mais à vrai dire, nous ne sommes même pas jaloux. Nous apprécions de nous recentrer sur l'essentiel, d'avoir à manger et à boire, un toit et notre famille autour de soi. Et pendant que vous grossissez, nous, on maigrit !!!




LES DIEUX EN FRANCE ET EN INDE





Ganesh


En France, nous avons quelques dieux assez discrets. En Inde, il y a des milliers de dieux tous plus farfelus les uns que les autres... Nous sommes réveillés par la prière des musulmans, nous passons devant des dizaines de temples colorés en traversant la ville, nous avons également quelques modestes églises... Les dieux multicolores en carton pâte font partie du paysage et s'invitent dans les maisons lors des différents festivals. La religion est omniprésente ici. Tout le monde, ici, pense que les dieux vont nous sauver de ce vilain virus. Moi, je préfère compter sur moi-même...



LE YOGA EN FRANCE/ LE YOGA EN INDE





Le yoga en France reste, encore aujourd'hui, malheureusement, souvent considéré comme un sport pour personnes âgées ou une secte, quand il n'est pas décliné en disciplines toutes plus délirantes les unes que les autres aux noms improbables et qui laissent confus les néophytes.

En Inde, nous avons un ministère du yoga, des cours de yoga à tous les coins de rue et des villes réputées pour leurs bons profs : Mysore, Pune, Rishikesh, Goa...

Evidemment, il faut faire le tri et les imposteurs et gourous cupides existent, mais une fois que vous faites confiance à votre instinct pour trouver le bon prof, que vous faites tomber vos barrières culturelles et que vous lâchez prise, c'est un pur délice !

Je ferai sans doute un jour un article complet pour parler du yoga qui a clairement transformé ma vie en 5 ans : habitudes alimentaires, concentration, calme, empathie, etc. (Il y a des rechutes, naturellement, mais de moins en moins nombreuses...)

Retenez juste que le yoga n'est pas un sport, mais l'union du corps et de l'esprit et que son but ultime est d'atteindre un état d'esprit positif.

Le yoga que je pratique, le ashtanga, comporte 8 branches ou règles de vie pour atteindre le bonheur, définies dans les Yoga Sutras de Patanjali :

1. yama : règles de conduite : non-violence (ahimsa), vérité (satya), honnêteté (asteya), continence (brahmacharya) et non-convoitise (aparigraha). Ces règles morales se retrouvent d'ailleurs dans toutes les religions.

2. niyama : auto-discipline

3. asana : postures, le corps étant le temple de l'esprit

4. pranayama : contrôle de la respiration

5 pratyahara : recul sur nous-même

6. dharana : concentration

7. dhyana ; méditation ou flux ininterrompu de concentration

8. samadhi : extase, connexion avec le divin, paix.
Si l'on estime qu'atteindre le divin signifie atteindre la paix totale, la sérénité, j'adhère aux 8 branches.








EN CONCLUSION… (oui, promis, après, vous pourrez aller vous coucher !)





Force est de constater que toutes ces différences m'ont aidée à déplacer mon point de vue, à m'accommoder d'un confort parfois sommaire, à devenir (très) patiente et à revenir à l'essentiel, et j'en suis très heureuse, au point qu'en 5 ans, pas une fois je n'ai regretté cette décision d'être venue en Inde, même si vous me manquez chaque jour énormément.



Venir en Inde, c'était notre choix et vous n'avez en aucune façon à le valider ou à l'encenser. Je n'attends de vous aucune compassion, aucune pitié, aucun atermoiement, juste de la compréhension.

Aujourd'hui, nous sommes loin des nôtres, dans une société qui bénéficie de 0,7 lit pour 1 000 habitants, 6 médecins pour 10 000 habitants. Nous sommes confinés depuis 3 semaines déjà pour Aëlya, 2 semaines et demie pour Aïnhoa, Amaïa, Fred et moi. Nous avons évidemment un peu peur que la situation dégénère. Aujourd'hui, les routes et les aéroports sont fermés, l'approvisionnement en denrées de base est difficile et la violence policière augmente.

Mais aujourd'hui, à vrai dire, nous nous inquiétons surtout pour vous, qui êtes au centre de la tempête et pour ceux qui, moins chanceux que nous, doivent faire la queue sans protection pour obtenir la soupe populaire promise par Modi.

Nous restons positifs et espérons que cette situation sera un déclencheur qui interpellera sur notre façon de vivre à tous, que ce soit en Inde ou en France.



Si j'ai écrit ce (long) texte, ce n'est pas pour me plaindre ou pour susciter une quelconque admiration, c'est uniquement, et je dis bien uniquement parce que j'ai eu la sensation que j'avais sans doute été trop positive en vous parlant de l'Inde, au point que vous pensiez que nous vivions dans du coton, ultra assistés et particulièrement chanceux (ce qui, à vrai dire, n'est pas complètement faux, tout comme vous, nous sommes effectivement très privilégiés d'être en bonne santé, d'être nés en France et d'avoir bénéficié d'un système social, qui, même chancelant aujourd'hui, reste parmi les meilleurs au monde, d'un système scolaire qui nous a permis l'ascension sociale, d'un environnement agréable et d'une sécurité...). L'Inde nous a juste appris à apprécier encore plus cette immense chance d'être nés français.

C'est ce que j'essaie de vous transmettre à travers mes cours de yoga, cet immense bonheur d'être vivante, d'être en bonne santé, d'aimer et d'être aimée.

Je vous aime. Soyez heureux.



Pour finir sur une note positive, écoutez ce message d'Aëlya et d'Amaïa...





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